Ray Davies en Concert à l’Olympia le 30 octobre 2010

Ray Davies

  • « See My Friends » Sortie le 02/11/2010 chez AZ/Universal

Le légendaire génie des Kinks revisite certains de ses plus grands succès écrits au cours de quarante-six années de carrière avec en sa compagnie une incroyable brochette d’artistes : Bruce Springsteen, Alex Chilton, Black Francis, Billy Corgan, Metallica et Jackson Browne et bien d’autres.

  • Concert à l’Olympia le 30 octobre 2010
Tracklisting
  • Ray Davies & Bruce Springsteen – ‘Better Things’
  • Ray Davies, Jon Bon Jovi & Richie Sambora – ‘Celluloid Heroes’
  • Ray Davies & Mumford & Sons – ‘Days/This Time Tomorrow’
  • Ray Davies, Lucinda Williams & The 88 – ‘ Long Way From Home’
  • Ray Davies & Metallica – ‘You Really Got Me ‘
  • Ray Davies & Paloma Faith – ‘Lola’
  • Ray Davies & Jackson Browne – ‘Waterloo Sunset’
  • Ray Davies, Alex Chilton & The 88 –  »Til The End of The Day ‘
  • Ray Davies & Amy Macdonald – ‘Dead End Street’
  • Ray Davies & Spoon – ‘See My Friends’
  • Ray Davies & Black Francis – ‘This Is Where I Belong’
  • Ray Davies & The 88 – ‘David Watts’
  • Ray Davies & Gary Lightbody – ‘Tired Of Waiting’
  • Ray Davies & Billy Corgan – ‘All Day And All Of The Night/Destroyer’

L’année a une fois encore été bien remplie pour Ray Davies. Avant même d’avoir terminé See My Friends, un des albums les plus intéressants, intrigants, et inspirants d’une carrière débordant de projets similaires, il était déjà bien occupé.

Ray est parti en tournée acoustique solo aux USA et au Royaume-Uni, avec en première partie le jeune groupe californien The 88, des fans des Kinks qui ont “auditionné” en lui envoyant leurs enregistrements d’une sélection de ses propres chansons. Il s’est produit au Danemark en compagnie d’un orchestre symphonique et d’une chorale, une expérience qui a donné envie à Davies de dépoussiérer une chanson qu’il n’avait jamais joué depuis son enregistrement en 1971, The Way Love Used To Be, tirée de la bande originale du film Percy. Il a également fait une apparition au festival de Glastonbury, où il a été rejoint sur scène par le Crouch End Festival Chorus pour une performance brillante, à l’occasion de laquelle il a rendu hommage à Pete Quaife, l’ex-bassiste des Kinks décédé en juin dernier. Le décès de Quaife, un ami d’enfance de Davies, avec qui il avait grandi dans le nord de Londres, “a été une grande perte pour moi. Pete a eu le courage de tout plaquer”, raconte Ray de manière admirable quand il évoque le départ de son ami du groupe en 1968. “Il faut un sacré courage pour faire ça. Il a littéralement claqué la porte”.

Davies est auteur jusqu’à l’os. Cela signifie qu’il est toujours ravi d’écrire de nouvelles compositions, comme par exemple Flatlands, une oeuvre chorale interprétée avec l’orchestre de musique de chambre Britten Sinfonia et “inspirée par la mythologie anglaise”, explique le créateur de The Village Green Preservation Society et Arthur, deux concept albums des Kinks aujourd’hui devenus des classiques. Et cela signifie aussi qu’il va de l’avant tout en s’inspirant du passé. Quand on a écrit autant de chansons que Davies, autant de titres aussi brillants qu’intemporels, on possède un back catalogue riche en trouvailles à recycler.

C’est ainsi qu’est né See My Friends, un album de collaborations avec une incroyable brochette d’artistes aux côtés de qui Davies reprend des chansons écrites au cours de ses 46 ans de carrière. On y retrouve Bruce Springsteen sur Better Things, Metallica sur You Really Got Me, Mumford & Sons sur Days/This Time Tomorrow, Paloma Faith sur Lola, ainsi que dix autres collaborations tout aussi inspirées.

«  Le projet est né presque par accident, explique Davies. J’étais entrain d’écrire de nouvelles chansons avec un artiste en particulier. En fait, je n’ai jamais vraiment enregistré avec d’autres personnes, ou écrit pour d’autres. Au départ, ça a commencé comme un projet de collaboration : j’allais écrire des chansons pour des gens. »

Et puis pendant l’été 2009, Ray a enregistré une version de Till The End Of The Day (extraite de l’album The Kink Kontroversy, publié en 1965) avec le chanteur de Big Star, Alex Chilton. Davies avait fait la connaissance de Chilton, décédé en mars 2010, à l’époque où il vivait à la Nouvelle-Orléans. Chilton faisait partie de ceux qui avaient sympathisé avec Davies après qu’il a été blessé par balle à la jambe lors d’une attaque à main armée dans la rue en 2004. Mais le projet n’a vraiment pris corps qu’à la fin de l’an passé à New York.

« J’ai donné un gros concert là-bas, pour le 25eme anniversaire du Rock And Roll Hall Of Fame. C’est là que j’ai rencontré Bruce Springsteen. Il a dit qu’il était très content de participer. On a fait Better Things, qui avait été un hit pour les Kinks aux Etats-Unis, mais pas en Angleterre. Et j’ai joué You Really Got Me et All Day And All Of The Night avec Metallica. Tout est parti de là…. »

Davies n’a pas eu de scrupule à donner une seconde vie à ces classiques. Son passé musical n’a rien d’une terre inconnnue, et son catalogue rien d’une vache sacrée. Il était prêt à s’ouvrir aux idées d’autres artistes et à leurs interprétations.  Et il a été ravi de se laisser porter là où la musique le menait, à tous les sens du terme : d’Oslo au Danemark en passant par l’Allemagne et la Belgique pour enregistrer avec Metallica, New York pour enregistrer avec Bon Jovi, le New Jersey pour Bruce Springsteen, Chicago pour Billy Corgan des Smashing Pumpkins, et chez lui dans son studio du nord de Londres pour le reste.  « Ce disque a déjà pas mal voyagé ! », sourit Ray.

Tout ça a été réalisé sans cérémonie : Jackson Browne a fait un saut avec une Gibson acoustique toute cabossée au beau milieu d’une tournée européenne, Paloma Faith est venue avec tout son groupe et Frank Black a fait un passage express un après-midi.

« J’aime le travail collectif. J’ai travaillé pour des comédies musicales et pour le théâtre. J’ai remarqué que beaucoup de personnes qui font ce que je fais ont peur des collaborations. Ca les effraie. Ils ne veulent pas se remettre en question. Ils veulent la sécurité de leur propre talent et de l’organisation avec laquelle ils ont l’habitude de travailler. Mais la peur de l’échec ne m’effleure jamais l’esprit.

Un dialogue s’est établi entre Davies et les artistes en Grande-Bretagne et aux USA.  Certains étaient fans de lui. D’autres lui ont été suggérés. Il en connaissait certains de longue date. Il avait rencontré Springsteen plusieurs fois au cours des années, mais ils n’avaient jamais travaillé ensemble.

« Je voulais en quelque sorte jouer le rôle de catalyseur, je voulais arriver à faire chanter une chanson donnée d’une manière donnée à ces artistes, puis trouver ma place sur leur interprétation. Mais pour Better Things (tirée de l’album paru en 1981 Give The People What They Want), que j’ai faite avec Bruce, les choses ne se sont pas vraiment passées comme ça puisqu’on l’a tous les deux chantée comme on chante d’habitude. Je suis particulièrement satisfait de la nouvelle outro à laquelle j’ai pensé. Je ne l’avais pas soumise à Bruce, et je l’ai juste interprétée quand on jouait l’accompagnement. J’ai rallongé la fin pour qu’on puisse se renvoyer la balle à la fin du morceau. Il a tout de suite compris et il a rebondi de manière très pro. Je suis très content. »

« Pour certains titres, il a fallu que je prenne en compte le style des autres artistes, sinon le tout aurait été bancal. Et puis je voulais que l’album puisse s’écouter comme un tout. Chaque morceau avait une vie propre. »

Ainsi, la chanteuse country Lucinda Williams, accompagnée par The 88, « insuffle un nouveau souffle, une nouvelle énergie » à A Long Way From Home (tiré de l’album paru en 1970 Lola Vs Powerman And The Moneygoround Part One), tandis que l’auteur-compositrice-interprète écossaise Amy Macdonald replace le single Dead End Street (1966) “au coeur du contexte social d’aujourd’hui… Autant que je sache, Amy n’avait jamais chanté dans un autre studio que celui où elle a travaillé avec son manager. » Alors quand Davies l’a invitée dans son QG du nord de Londres, les studios Konk, « c’était tout nouveau pour elle… Je me suis assis avec elle, elle ne pouvait pas chanter le titre dans la même tonalité que moi, alors j’ai adapté la chanson et écrit une harmonie sur laquelle nous nous sommes calés. Ca a généré des problèmes différents de l’original, mais le résultat final est très bon. J’ai aussi écrit une nouvelle intro, différente de celle qu’on trouve sur l’enregistrement des Kinks de Dead End Street. J’ai écrit un nouveau mouvement qui ressemble à une chanson swing. »

Cet exemple, ajoute-t-il, illustre bien l’approche très libre qu’il a adoptée dans son travail avec chacun des artistes sur chacun des titres : « J’ai laissé toutes mes idées préconçues à la porte. J’ai adapté les arrangements en fonction de la situation dans laquelle nous nous trouvions sur le moment. Il faut bien réaliser que la reprise de la chanson n’est pas tout pour moi. L’important, c’est de tirer de l’artiste une performance unique », précise-t-il en parlant de l’interprétation de Gary Lightbody de Snow Patrol de Tired Of Waiting For You (1965), dont Davies a modifié le ton du pont pour s’adapter à la voix « légère et éthérée » du chanteur. « Parce que j’ai aussi tenu le rôle de producteur.  Et je n’avais pas envie que les gens arrivent en studio juste pour répéter du déjà-entendu. Chaque artiste a donné sa propre interprétation des titres. »

Cela signifie également que Davies s’est parfois incliné devant le choix des artistes. Il avait été initialement impressionné par la sélection de ses chansons opérée par The 88 pour leur CD « d’audition ». « Ils ont choisi des morceaux que peu de gens auraient choisi de jouer, des chansons que je n’ai pas jouées depuis longtemps. » Sur See My Friends, ils interprètent David Watts (de l’album paru en 1967 Something Else, et dont The Jam a déjà fait une mémorable reprise) et remplissent le rôle occasionnel de groupe d’accompagnement.

Le leader des Pixies, Frank Black, « a choisi le ton » sur This Is Where I Belong (une face B datant de l’époque de Face To Face, 1966), « et je l’ai laissé décider du style dans lequel on a fait la chanson. Là encore, il s’est agi d’aborder la chose avec une grande ouverture d’esprit. Il a fallu un peu lâcher les rênes… »

Cela est tout aussi évident sur la magnifique nouvelle version de Waterloo Sunset (également tirée de Something Else) enregistrée avec Jackson Browne : « c’était un casting pour le moins inattendu », reconnaît Davies à propos de cette chanson à la quintessence toute londonienne. Mais Davies n’est pas difficile. Tout a été fait pour mettre en valeur ces nouvelles idées, ces nouveaux sons et ces nouvelles expériences. « J’ai ajouté un nouvel arrangement vocal autour de ce qu’a fait Jackson. Et le pont (« every day I look at the world from my window ») a été réalisé de manière unique. On y chante tous les deux. Un peu comme un truc sud américain ou mexicain. »

Ce voyage de globe-trotter à travers tous ces univers artistiques et sur des sentiers peu empruntés a été très excitant. East and West, la chanson de 1965 qui donne son titre au disque et dont Pete Townsend a dit qu’elle était plus innovante que Norwegian Wood des Beatles, a été écrite en partie à Bombay, mais aussi à Muswell Hill, et a ici été repensée avec Spoon, un groupe d’Austin que Davies a rencontré lors d’un concert du festival SXSW où lui et eux se sont produits cette année dans la ville texane.

« Je pense que les artistes ont tout donné », dit Ray en connaisseur. « Les bons sont ceux qui n’étaient pas connus et qui venaient de nulle part, comme le morceau de Lucinda, dont beaucoup de gens ne savent pas qu’il s’agit qu’une chanson des Kinks. Et maintenant, on en a fait quelque chose en l’interprétant en duo. Elle lui appartient en partie, à présent. Avec un peu de chance, elle l’inclura dans son répertoire. »

« C’est le truc avec ce disque : j’aimerais avoir l’impression que toutes les chansons qui le composent auraient pu faire partie du répertoire des artistes qui les interprètent. Et que je ne les ai pas forcés à les choisir. »

Et l’homme ? Qu’a-t-il retiré de cette expérience avec ses amis ?

« Ca m’a donné envie d’écrire de nouvelles chansons, sourit-il. Parce que c’est ça, mon job. Mais j’aime aussi ce processus, l’idée d’essayer des chansons avec d’autres personnes. C’est un processus de découverte. »

http://www.seemyfriends.co.uk/

Description titre par titre de l’album See My Friends

*Till The End Of The Day – Alex Chilton*

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http://www.youtube.com/watch?v=f_AYM5hADHQ&feature=related

A l’époque : « Big Star, le groupe d’Alex, a fait une reprise de Till The End Of The Day sur les sessions de Third/Sister Lovers. J’aurais adoré avoir Big Star en studio avec moi. C’était bon de se remémorer une reprise d’une de mes chansons qui a été faite il y a 40 ans. »

Aujourd’hui : « Alex est la première personne à qui j’aie pensé pour ce projet. Il est venu à Konk le 4 juillet 2009, et il a été le premier à enregistrer pour le projet. A ce moment-là, la maison de disques ne savait pas vraiment qui il était, mais moi, je connaissais son héritage musical et sa valeur d’artiste. Je voulais un groupe maison pour accompagner chaque artiste. Mais Alex était tout seul en Grande-Bretagne pour des concerts solo. Alors on a commencé avec moi à la guitare acoustique, et une trame sur laquelle on s’est calés avec Alex au chant. Ensuite, j’ai ajouté le groupe. Alex a enregistré Till The End Of The Day et Set Me Free, mais nous ne les avons pas utilisés sur l’album. »

*Tired Of Waiting For You – Gary Lightbody (Snow Patrol)*

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http://www.youtube.com/watch?v=Hz64hWng2vM

A l’époque :  « Ce titre a été écrit pour (le deuxième album des Kinks) Kinda Kinks, qui a été réalisé en une semaine. La date de sortie avait été calée, et la pochette dessinée, mais aucune chanson n’avait été écrite. J’en avais une ou deux en route ; à l’époque, j’étais un jeune auteur débutant. Je crois qu’il n’y avait que six titres originaux sur le premier album des Kinks. Alors pour Kinda Kinks, ils ne voulaient que des originaux. Pour moi, c’était un sacré challenge : on rentrait juste d’une tournée mondiale, et j’écrivais des chansons pendant les sessions studio. Tired Of Waiting For You est une des premières chansons que j’aie écrites. J’ai écrit la base musicale avant d’écrire You Really Got Me. Je vivais avec ma soeur à Highgate dans le nord de Londres, et je m’entraînais à la guitare, et j’ai écrit le gros de la musique quand j’avais 15 ou 16 ans. »

Aujourd’hui : « J’avais vu Snow Patrol sur scène à une soirée organisée par l’industrie du disque. Ils avaient des problèmes de son. J’ai été impressionné par leur détermination à terminer le concert. La juxtaposition de la musique à la voix de Gary, qui est plutôt évanescente, donne un résultat intéressant. Il a apporté quelque chose de spécial. »

*Mumford & Sons – Days / This Time Tomorrow*

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A l’époque :  « Days a été écrite et enregistrée après l’enregistrement de Village Green Preservation.  A l’origine, ça devait être un titre bonus sur l’album ou sur le single… Et je ne sais pas pourquoi on ne l’a pas mise sur le disque. L’album a été repoussé pour une raison ou une autre, parce qu’à l’époque, on était interdits de séjour en Amérique… »

Aujourd’hui : « La première fois que j’ai vu Mumford & Sons jouer, c’était sur YouTube. J’ai donné un concert avec eux quelques jours avant d’enregistrer le titre.  Cette collaboration était très différente des autres : contrairement à Alex et Gary, qui se sont accompagnés à la guitare acoustique, Mumfords a joué en tant que groupe, ici à Konk. On me les a fait découvrir relativement tard dans l’élaboration du projet. lls voulaient faire This Time Tomorrow. Je suis toujours agréablement surpris quand les gens choisissent des chansons peu connues. Ils avaient vu le film de Wes Anderson The Darjeeling Limited – il y avait aussi une de mes chansons sur la BOF de Rushmore – et c’est là qu’ils avaient entendu la chanson. J’ai pensé que ça serait une bonne idée de l’incorporer à Days.  De faire un mélange des deux chansons. Je trouve le résultat très réussi. »

*You Really Got Me – Metallica *

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A l’époque :  « Quand j’ai écrit ça, je voulais faire un disque qui sonne complètement différemment de tout ce qui avait existé jusqu’alors. Est-ce un titre garage ?… Euh, on a effectivement répété dans un garage ! Mais c’était avant l’invention du terme “groupe garage”.  Quand You Really Got Me est sorti, il s’est classé numéro un, et les gens ont dit qu’ils n’avaient jamais rien entendu de pareil. C’était brut, ça avait un petit côté jazz. Quand je l’ai écrit, je voulais un titre jazz. Pas comme Ornete Colemann ou Charlie Parker. Mais ça groove. Et puis nous avions le son incroyable de la guitare de mon frère. Un son unique, une signature sonore. Pour obtenir un effet de distorsion, nous avions un pré-ampli, un petit ampli de huit watts qu’on appelait un ampli vert, dans le haut-parleur duquel on enfonçait des aiguilles à tricoter ou qu’on lacérait avec des lames de rasoir pour qu’il vibre davantage. Ensuite, on a branché ça dans un AC30.  C’était avant les programmations, et les pédales fuzz n’existaient pas à cette époque. Ce disque a été un des premiers disques à succès à utiliser la distorsion. »

Aujourd’hui : « En octobre dernier, j’ai participé à un gros événement au Madison Square Garden pour le 25 eme anniversaire du Rock and Roll Hall of Fame. Metallica a demandé à faire une reprise de You Really Got Me avec moi, ce qui m’a beaucoup flatté. Beaucoup de gens disent que All Day And All Of The Night, la chanson suivante, marque le début du heavy metal. You Really Got Me était davantage une chanson garage. A New York, on a joué les deux, comme si les deux titres étaient liés. On s’est très bien entendus. J’ai dû aller à Oslo pour les enregistrer, parce qu’ils étaient en tournée là-bas. On a fait ça vite fait. J’étais impressionné par la quantité d’énergie qu’ils avaient en réserve. On a enregistré avant qu’ils montent sur scène.  Ils avaient fait préparer un studio exprès. On a enregistré en quatre prises. »

*A Long Way From Home – Lucinda Williams*

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A l’époque :  « on peut s’identifier à cette chanson, qui possède sa propre charge émotionnelle… C’est une chanson d’amour, mais qui parle de drôles de sujets : de quelqu’un qui… Bref… Elle a été écrite pour mon frère Dave, pour l’avertir des dangers du succès, et de ne pas perdre le contact avec ses racines. C’est de ça que parle la chanson. Tu penses que tu as du succès, mais au fond, tu es toujours la même personne. »

Aujourd’hui : « J’aime Lucinda depuis que j’ai habité à La Nouvelle-Orléans. Et j’ai travaillé avec Ray Kennedy, qui a produit son grand album Car Wheels On A Gravel Road. Il a produit Working Man’s Café avec moi. Et il m’a parlé de Lucinda. Je l’avais rencontrée au festival SXSW à Austin, Texas, il y a une dizaine d’années. Elle est venu à ma rencontre dans une station de radio où on se trouvait tous les deux (elle portait un petit chapeau de cowboy) et m‘a dit : « tu veux chanter un duo avec moi ? » J’ai répondu « pas maintenant ». Mais des années plus tard, je l’ai contactée et nous avons trouvé cette chanson, dont le choix lui revient en partie. Elle était en tournée, et je suis allé la voir jouer à l’Empire de Shepherd’s Bush. Le lendemain, on est entrés en studio, et elle avait appris la chanson pendant la nuit. Elle ne la connaissait toujours pas bien ! On l’a reprise ligne par ligne, et après trois ou quatre prises, on avait la chanson en entier. On l’a jouée sur des guitares acoustiques, comme avec Alex, avec elle et moi au chant. C’est passé comme une lettre à la poste. Elle a un super accent. J’adore les accents. C’est pour ça que j’ai aimé Amy Macdonald – je l’ai faite parler à la fin de sa chanson. Avec Lucinda, c’est sa manière de prononcer certains mots qui est super. C’est un peu comme si j’avais écrit la chanson exprès pour elle. Le groupe qui nous accompagne est The 88, un jeune groupe californien qui a assuré ma première partie cette année en Amérique. De très bons musiciens. Un mariage parfait ! »

*Dead End Street – Amy MacDonald*

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http://www.youtube.com/watch?v=i0WPC-N3UYE

A l’époque : « ce titre est arrivé juste après Sunny Afternoon. A l’époque, je jouais beaucoup de mes chansons à mon père. Je les essayais sur lui. Il avait vécu la Dépression des années 20 et 30 et était socialiste. J’ai essayé de replacer la Dépression dans un contexte moderne. »

Aujourd’hui : « c’est assez intéressant, parce que lorsque je l’ai faite avec Amy,  cette chanson m’a parue vraiment moderne.  Entendre sa voix prononcer les mots : « pour quoi vivons-nous, un deux-pièces au deuxième étage ? » Il y a tant de jeunes qui ne peuvent pas se payer leur première maison. Ca pourrait être une chanson sur l’accès facile au logement. L’original possédait un élément de music-hall qui se mêlait à un élément swing. Et un peu de bebop. Je suis donc resté un octave en dessous d’elle, avec une petite section de cuivres pour l’effet bebop… Là non plus, je ne savais pas comment ça fonctionnerait. J’avais entendu l’album d’Amy et son single, mais ça n’est que lorsque vous entrez en studio avec quelqu’un… En plus, nous n’avions pas beaucoup de temps. J’ai finalisé l’arrangement quand je l’ai entendue parler. »

*Waterloo Sunset – Jackson Browne *

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A l’époque : « [Avant de l’écrire] j’ai regardé plusieurs couchers de soleil sur Waterloo. J’ai séjourné à l’hôpital St Thomas quand  j’étais petit, pour une blessure assez grave. Je me souviens d’avoir regardé la rivère à ce moment-là. Plus tard, quand j’étais étudiant, j’allais régulièrement à la gare de Charing Cross pour me rendre dans le sud de Londres où j’allais à la fac. Mais l’événement important a été ma première véritable petite amie, qui est devenue ma femme. La première fois que nous avons marché là… Mais je suis également détaché de la chanson. Pour finir, Terry et Julie sont deux personnages sans doute mes sœurs aînées. J’écrivais cette chanson pour elles et pour le futur que je voyais pour elles. »

Aujourd’hui : «  Ce casting est des plus imprévus. Jackson était en tournée en Europe, et mon agent m’a appelé pour me dire qu’il aimerait faire un titre. Je n’arrivais pas à trouver une idée d’une chanson qu’il aimerait faire. Peut-être une de mes chansons aux sonorités Côte Ouest ? Et mon agent a dit : « pourquoi  tu ne le laisses pas faire Waterloo Sunset ? » Je me suis dit : « c’est un drôle de choix… » Jackson est arrivé en studio avec une jolie Gibson acoustique toute usée. Il jouait en ré, mais la chanson est écrite en mi, et il jouait en accord ouvert. Il avait désaccordé la dernière corde, ce qui lui donnait une résonance intéressante. On était juste nous deux, deux guitares et deux voix. Je ne voulais pas gâcher ça… L’intéressant dans tout ça, c’est que ça m’a fait réaliser que la chanson est assez soul. La combinaison de sa voix et de son jeu avec ma chanson en ont fait quelque chose d’unique. C’est un des arrangements les plus simples du disque. »

*David Watts – The 88*

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A l’époque : « David Watts était un Anglais de très bonne éducation qui a assuré la promotion d’un des concerts des Kinks il y a de nombreuses années, dans les Midlands. C’était un personnage très impressionnant. Quand j’ai écrit la chanson, j’ai imaginé être à l’école avec lui. Il était chef de classe, celui qu’on admire et qu’on prend comme modèle. Et il avait toutes les qualités d’un leader. »

Aujourd’hui : « Paul Weller a fait une superbe version de David Watts avec The Jam, et revisiter ce titre aurait été inapproprié. C’est difficile… Je connais Paul depuis longtemps. Peu de gens le savent, mais Paul et moi avons écrit plusieurs chansons ensemble il y a une vingtaine d’années. Elles ne sont jamais sorties, et je ne retrouve pas les démos. Mais The 88 m’ont été recommandés par notre agent pour faire mes premières parties aux USA plus tôt cette année. Il a proposé quatre groupes, et il m’a semblé qu’eux avaient la patte requise pour ce titre. J’ai fait une heure et demie d’acoustique avec mon guitariste, et puis ils sont arrivés et on a joué une demi-heure ensemble. C’est un sacré groupe… Ensuite, ils sont venus à Londres… Je trouve qu’ils se sont très bien débrouillés avec les chansons. »

*Better Things – Bruce Springsteen*

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A l’époque : « Je l’ai écrite à New York, où je séjournais à l’époque, dans les années 80. Les Kinks étaient entre deux disques, et j’ai écrit ça pour un de mes amis qui était en plein divorce difficile. J’ai écrit la chanson pour soutenir cette personne. Elle s’appelle Better Things, mais les gens disent qu’elle est empreinte de tristesse. Pour moi, c’est une chanson positive, qui parle de surmonter des tragédies que nous vivons tous, des crises personnelles… Vous savez, c’est l’idée que demain est un autre jour, que devant nous, on a des jours meilleurs… C’est ce sentiment que Bruce est parvenu à retranscrire. Sa musique a la fibre de la classe ouvrière. C’est de ce côté que vont mes sympathies. »

Aujourd’hui : Les Fountains of Wayne en ont fait une chouette version sur la BOF de The Manchurian Candidate. Et puis j’ai vu Bruce à ce concert à New York au Madison Square Garden. Il a suggéré de choisir Better Things comme titre à faire ensemble. Ce qui est bien, c’est que ça n’est pas You Really Got Me. You Really Got Me est super bien repris par Metallica, mais ça n’est pas une chanson que tout le monde peut reprendre. Le processus en lui-même a été très intéressant. J’ai fait la trame musicale à New York à Electric Ladyland avec des musiciens que je connais là-bas, et qui jouent au David Letterman Show. Ensuite, nous sommes allés chez Bruce dans le New Jersey, au studio qu’il a installé chez lui. On a chanté pendant une demi-heure, mais parlé pendant des heures ! Il est très érudit, il avait fait ses recherches, il connaissait mon travail. C’était un après-midi très agréable. »

*Celluloid Heroes – Bon Jovi*

A l’époque : « J’ai écrit ce titre aux USA, lors d’un séjour à Los Angeles. Ca reflète ma vision de l’univers du cinéma, des conflits au sein du star system, mon point de vue sur l’échec, sur la fugacité du succès et sur la manière dont les gens gèrent ça. Hollywood Boulevard est un endroit symbolique, beau. Un endroit glamour et clinquant. Mais cela peut aussi vite devenir un endroit très trash, très cheap. Cette combinaison est attirante, ce que la célébrité fait aux gens, aux personnages de la chanson. Greta Garbo : c’est la raison pour laquelle elle était ce qu’elle était. »

Aujourd’hui : « C’était il y a environ huit ans, à une cérémonie de remise de prix. Bon Jovi se produisait à Londres, et le groupe m’a demandé d’être leur invité. Alors on a joué cette chanson à Hyde Park. On avait donc déjà un passé commun. Quand on s’est mis au travail sur le titre, on a trouvé une copie pirate [de ce concert] sur iTunes ou un site du genre. On a basé notre arrangement dessus. Jon a enregistré des voix super à New York, et Richie Sambora est venu à Konk pour enregistrer les guitares. »

*Lola – Paloma Faith *

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http://www.youtube.com/watch?v=Jow3z7v5uo0&feature=fvst

A l’époque : «  J’ai écrit ce titre à Paris, après une confrontation avec quelques drag queens. Les chansons évoluent… En général, rien n’arrive par hasard. C’est une série d’incidents qui sont assemblés et dont on tire des bribes d’information, et dont on fait ensuite des chansons. »

Aujourd’hui : « C’est une chanson pour laquelle il est difficile de trouver un interprète, et à fortiori une femme. Mais ça correspond au sens de l’humour de Paloma. Et puis elle a une voix incroyable. Arriver à terminer la chanson sans inflexion du poignet (eh oui, la chanson parle d’un travelot)…  Son interprétation est pleine de sensibilité. Elle a ce truc rusé dans la voix, ce truc drôle et spirituel. C’est une fille très intelligente. Elle est venue répéter, et puis on a enregistré avec son groupe. Elle voulait absolument qu’on fasse un bon arrangement, pour que la chanson soit de qualité. Enfin, ça n’est pas comme si aucune de ces chansons n’étaient pas bonnes à garder. »

*This Is Where I Belong – Black Francis*

A l’époque : « Ce titre date de la période Face To Face. C’était une face B. Plusieurs de mes morceaux préférés sont des faces B. »

Aujourd’hui : «  C’est étrange que ce titre ait fini sur le disque, parce que j’ai débuté ma tournée cette année avec cette chanson. Pour je ne sais quelle raison, je l’ai inclus à ma set list. Ron Sexmith en a fait une reprise il y plusieurs années. Il a une voix magnifique.  Et je l’ai faite en concert avec Matthew Sweet. J’ai toujours bien aimé Frank Black. Il y a une dizaine d’années, il a fait un album solo pour lequel il voulait que j’écrive avec lui.  Mais on n’a jamais concrétisé ce souhait. Nous avons interprété ce titre à deux guitares acoustiques dans la pièce, pour commencer, puis nous nous sommes concentrés sur sa partie, et on a ajouté la mienne une fois qu’on avait fini. Il était en tournée, il fallait qu’il quitte la ville ce soir-là pour un concert. Alors on a travaillé très vite. Ensuite, j’ai mis mon groupe maison (le groupe qui m’accompagne en tournée) derrière lui. »

*Destroyer/All Day And All Of The Night – Billy Corgan*

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http://www.youtube.com/watch?v=F4DV-5d6a5g

A l’époque :  « Destroyer n’est jamais sorti ici. Le morceau est né quand nous enregistrions un album qui s’appelait Low Budget en Amérique. Le titre ne figure pas sur l’album, mais il existait. J’en avais la structure dans la tête, mais j’ai effectué des changements d’accord pendant la session. Ensuite, on l’a enregistré en deux prises, au Power Station à New York. C’était la version originale des Kinks, enregistrée littéralement sur le vif. C’était un très bon exemple de ce que les Kinks étaient : un groupe toujours sur la brèche, toujours sur la route. On était capable de ça… »

Aujourd’hui : « Billy connaissait très bien la chanson. En fait, j’étais en négociation avec quelqu’un d’autre qui devait interpréter la chanson. Et puis le nom de Billy a été prononcé parce qu’il cherchait à me joindre par email pour je ne sais quelle raison. On a le même agent aux USA. D’un seul coup, je me suis dit qu’il serait parfait sur Destroyer. Comme Destroyer utilise le riff de All Day And All Of The Night, nous avons décidé de fusionner les deux chansons. Ce titre est un des seuls à avoir été réalisé par voie électronique. Une fois qu’on s’est mis d’accord sur la structure, il a fait ses parties et me les a envoyées par mail. Je les ai arrangées de la manière qui me convenait, et j’y ai ajouté la batterie et les autres instruments. Quand quelqu’un chante des paroles, on a l’impression qu’il connait la chanson et qu’il a réfléchi à ce qu’elle veut dire.  Pour Destroyer, Billy avait bien potassé. »

*See My Friends – Spoon *

Voir l’original des Kinks

http://www.youtube.com/watch?v=S2Al7u0cKRk

A l’époque :  « J’ai commencé à écrire ce titre à Bombay, sur le trajet d’une tournée en Australie, et je l’ai terminée à Connaught Gardens à Muswell Hill.  Elle m’a été inspirée par les pêcheurs qui partent travailler à l’aube en chantant. Cette chanson est plus intéressante par sa sensibilité que par sa structure musicale. Je n’ai pas essayé de devenir indien en l’écrivant ! Je n’ai jamais eu envie d’acheter de la verroterie, ni de suivre le Maharishi et tout ce cirque. J’ai été touché par la sensibilité, c’est comme ça que j’écris. Ca parle des gens, de l’environnement dans lequel je me trouvais, de la manière dont ils vivaient leur vie dans toute cette pauvreté, et de la manière dont ils célébraient la vie quand ils partaient travailler, avec une chanson.  Je n’ai pas voulu écrire un hymne hippie ou quoi que ce soit du genre. Il y avait beaucoup de feedback sur l’enregistrement original des Kinks, parce que j’utilisais une vielle douze-cordes qui créait des parasites dans mon ampli. C’était un accident, pas un calcul. »

Aujourd’hui : « J’ai pensé à Spoon après avoir réailsé une interview avec le chanteur, Britt Daniel, pour un magazine. Nous avons aussi joué dans le même festival, SXSW, plus tôt cette année. Apparemment, ils ont donné un super concert qui a fait d’eux  le clou du festival. Une fois encore, ça c’est fait par un heureux concours de circonstances.  Ils étaient en tournée en Angleterre au moment où je mettais en boîte des morceaux. »

Le clip :

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